(BRUXELLES2) Un gang de trafic de migrants, d’origine tchétchène, a été démantelé en Autriche par les polices autrichiennes et hongroises, soutenues par le centre européen contre l’immigration clandestine (CSEM) d’Europol, jeudi (21 juillet). Et 7 suspects ont été arrêtés en Autriche et un en Hongrie. Cela permet d’en savoir un peu plus sur ce réseau et leurs méthodes.
Ce groupe était composé de 25 ressortissants russes d’origine tchétchène résidant en Autriche. L’animateur clé recrutait des chauffeurs en Autriche pour les déployer ensuite en Hongrie. Il était en contact permanent avec des « recruteurs » chargés de recruter des migrants dans les camps de réfugiés en Hongrie. Le réseau criminel est ainsi soupçonné d’avoir clandestinement fait passer plus de 200 personnes.
Les migrants clandestins — de nationalité afghane, iranienne, irakienne et syrienne — payaient environ 300 euros par personne pour aller de Hongrie à Vienne, 700 à 800 euros pour aller de Hongrie en Allemagne. Afin d’éviter d’être détectés par la police, les trafiquants utilisaient des itinéraires de rechange pour entrer en Autriche, en passant par la Slovaquie.
Au moins dix cas de trafic ont ainsi été détectés en Autriche, en Allemagne, en Hongrie et en Slovaquie par les autorités dans les deux derniers mois. Et les chauffeurs arrêtés en Autriche et en Slovaquie. Dans les jours suivants, plusieurs autres suspects impliqués ont été identifiés et arrêtés à leur tour.
(NGV)
Le général Dunford avec son homologue turc le général Hulusi Akar, le chef d’état-major turc, lors de sa visite en Turquie en janvier (crédit : Dod.Us / Archives B2)
(BRUXELLES2) « Je n’avais vraiment aucune indication que le coup d’Etat allait avoir lieu ». C’est en ces termes que le chef d’état-major de l’armée américaine, le général du corps de marines, Joe Dunford, s’est exprimé face à quelques journalistes « embeded » dans son avion au retour d’une visite de trois jours en Afghanistan. « C’est une surprise pour moi que cela se soit passé » a-t-il ajouté.
Le renseignement US ne vaut plus rien !
Une déclaration qui interpelle. Ne pas voir venir un coup d’Etat de cette ampleur chez un allié aussi proche, où les contacts sont quotidiens, tant en Turquie (les Américains sont colocalisés sur la base d’Incirlik) qu’au siège de l’OTAN, à tous les niveaux, prête vraiment au doute. Doute d’autant plus renforcé que le renseignement russe avait apparemment prévenu 36 heures auparavant Erdogan qu’un « coup » se préparait. Soit le renseignement US n’est plus vraiment à la hauteur, et cela impose des mesures d’urgence. Soit le chef d’état-major « enjolive la vérité ». En clair, il baratine.
Des listes de purges très bien préparées
Ce qui semble de plus en plus certain, en revanche, c’est que les listes de purge étaient prêtes avant le coup d’Etat. Pouvoir en quelques heures seulement annoncer des séries d’arrestations et de suspensions dans l’armée, la justice et la haute fonction publique n’est pas inopiné. Un sentiment exprimé par certains responsables européens. Le commissaire à l’Elargissement, l’Autrichien Johannes Hahn, a été particulièrement clair sur ce point lundi (18 juillet), lors du Conseil. « Avoir des listes disponibles aussi vite nécessite un peu de préparation » a-t-il expliqué « Cela veut dire qu’elles avaient été préparées depuis déjà quelque temps. » Sentiment identique chez le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Bert Koenders : « Il semblerait qu’il y avait déjà beaucoup de listes avec des noms de personnes qui sont arrêtées maintenant ».
Une course de vitesse entre putchistes et le pouvoir
L’ambassadeur turc en Bulgarie, Süleyman Gökçe, a d’une certaine façon accrédité cette explication allant même un peu plus loin. Dans un entretien à la télévision ‘Nova’ (interview reprise ensuite par plusieurs quotidiens), il explique que les arrestations et purges dans l’armée ou la magistrature étaient « programmées ». Le putsch visait « faire échouer cette préparation ». Ce qui suggérerait une sorte de course de vitesse entre les putchistes et le pouvoir. Le diplomate a ensuite rétropédalé dans une autre interview à la télévision bulgare, expliquant que ses propos avaient été mal compris. Ce sont « les interrogatoires menés dans les 24 à 48 heures qui ont suivi le putsch (qui) ont permis de tout démêler et de procéder aux arrestations ». Et de désigner les meneurs : « Le ministre des finances est impliqué, une partie du système judiciaire et de l’administration est impliquée aussi. C’était une tentative contre l’ordre constitutionnel et ils étaient préparés à mettre la main sur l’Etat ».
(Nicolas Gros-Verheyde)
Soldats turcs en entraînement (crédit : EUFOR Althea)
(BRUXELLES2) Le coup d’Etat manqué en Turquie a quelque peu déstabilisé l’opération de… stabilisation de l’UE en Bosnie-Herzégovine (EUFOR Althea), gérée en commun avec l’OTAN (1).
L’opération compte, en effet, un contingent turc non négligeable de l’ordre d’une compagnie, soit un bon quart de l’effectif environ (2). Pendant les quelques heures de flottement du coup d’état, s’est posée la question de la disponibilité des troupes.
Nous avons interrogé le QG d’EUFOR qui n’a pas voulu confirmer l’information mais ne l’a pas démentie non plus, préférant s’en tenir à un message formel du commandant :
The Turkish Contingent in EUFOR are professional soldiers and carry out their regular duties under EUFOR Command. They continue to contribute along with another 20 Nations in BiH, all focused on Capacity Building and training and providing a Safe and Secure Environment.
Selon nos (autres) informations, le commandant de l’EUFOR (COMEUFOR) a cependant demandé aux Hongrois (environ 200 militaires) présents à Sarajevo qui s’apprêtaient à rentrer au pays, de stopper immédiatement leur retour, le temps d’y voir un peu clair. La situation en Turquie s’étant « éclaircie », l’astreinte a été levée et le contingent hongrois a pu rentrer au pays (3).
Commentaire : Même si la compétence des soldats turcs ne peut être remise en cause, la fiabilité de l’engagement des forces turques dans des opérations multinationales comme EUFOR Althea risque d’être compromise, au moins dans les prochains mois. Les purges effectuées dans les forces turques pourraient, en outre, avoir pour effet de déstabiliser et compromettre l’engagement turc en externe. La question de la recherche de solutions alternatives va donc devoir se poser rapidement aux responsables de l’OTAN comme de l’Union européenne.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(1) Sous le format Berlin Plus, la chaîne de commandement est mixte. Le commandement de l’opération est assuré par le D-Saceur (le général britannique Sir Adrian Bradshaw) au SHAPE (le commandement suprême de l’OTAN) tandis que le commandement de la force est assuré par un militaire de l’UE, le général autrichien Friedrich Schrötter. Lire : Les accords de Berlin Plus (2015)
(2) L’opération n’a plus qu’un effectif de moins de 600 hommes.
(3) A noter qu’EUFOR Althea dispose d’une force de réserve intermédiaire qui est stationnée dans le pays d’origine. En l’occurrence, une unité des forces hongroises (de la taille d’une compagnie) reste en alerte en Hongrie.
Entre Boris et Didier une coupe de cheveux quasi-similaire ? (Crédit : Conseil de l’UE)
(BRUXELLES2) Normalement la star de ce Conseil aurait dû être Boris Johnson, le tout nouveau ministre britannique des Affaires étrangères. Tout auréolé de sa victoire au Brexit et de sa nomination surprise par Theresa May, la nouvelle première ministre, son arrivée était normalement prévue pour être triomphale. Elle a finalement été plus modeste voire même éclipsée par les autres évènements des jours précédents…
Dîner annulé : les 27 ne tiennent pas au +1
Un dîner avait été prévu avec les ministres des ’28’ pour parler ‘Brexit’. Mais le repas … a été annulé. Pas question de porter un toast de bienvenue au vainqueur du Brexit. C’est donc la Haute représentante, Federica Mogherini qui seule, a dû tenir sa responsabilité. Curiosité du hasard, cette rencontre aussi a bien failli ne pas avoir eu lieu. La faute… à la Royal Air Force. La fiabilité de la RAF n’est plus ce qu’elle était !
La RAF : déjà en exit ?
Si les Britanniques ne semblent pas pressés de déclencher l’article 50, leurs avions peinent à traverser la Manche. L’avion officiel, un BAE 146, a cependant bien décollé de l’aéroport (militaire) de Northolt (1). Mais quelques minutes plus tard, le vol a dû être interrompu pour se dérouter en urgence sur l’aéroport de Luton. En cause, « un défaut technique » impliquant « des liquides hydrauliques ». Dans ce type d’incident, l’atterrissage est requis « aussi vite que possible » nous confirme une source digne de foi. L’atterrissage en urgence de BoJo, sur Luton, n’a fait que des heureux apparemment. La fermeture temporaire de l’espace aérien a entraîné des retards en cascade pour les passagers de l’aéroport. Pour rejoindre Bruxelles, BoJo en a été réduit à utiliser un moyen… de transport « alternatif ».
Deux bonnes heures de retard, le dîner se transforme en un café avec eau plate
Résultat, le ministre britannique est arrivé à Bruxelles aux alentours de 22 heures… avec deux bonnes heures de retard sur l’horaire prévu. Plus question d’un dîner ‘2-3 plats’. La journée de Federica Mogherini, tout juste rentrée du sommet Asie-UE à Oulan Bator, avait déjà été bien chargée. La rencontre a donc été expédiée… autour d’un ou deux sandwichs, agrémentés d’une eau plate. Le temps pour les deux ‘politiques’ d’échanger sur les enjeux ordinaires des Affaires étrangères. « C’est une rencontre habituelle qu’a la Haute représentante avec tout nouveau ministre » relativise-t-on dans l’entourage de la Haute représentante. Quant au Brexit, il n’en a pas été question. Officiellement…
Un ton plus décontract et un peu plus décousu…
Le lendemain, à son arrivée au Conseil des ministres de l’UE, Boris a voulu faire figure de bon élève. Loin d’arriver en retard, il est largement en avance, à 7h40, la jouant ‘décontract’ et saluant même avec cette apostrophe, son homologue belge Didier Reynders arrivé en même temps que lui — « on se voit dans une minute » (see you in a minute). Même sa tignasse normalement ébouriffée s’était assagie, à deux poils près celle de Didier Reynders (voir photo) ! Je suis « très heureux d’être présent ici pour mon premier voyage au Conseil de l’Union » pour rencontrer « des amis et collègues » a-t-il précisé ensuite à la presse qui l’attendait de pied ferme. Le ministre a cependant joué « profil bas », condamnant les attentats de Nice comme le coup d’Etat en Turquie. Des déclarations somme toute assez « classiques » pour la diplomatie britannique. Mais, dans le ton, les à-côtés, le discours a paru nettement moins calculé que celui de ses prédécesseurs. Un peu plus décousu sans doute mais plus convivial également…
Profil bas et sourire sourires
En salle, les échanges ont continué d’être « très courtois » selon nos informations, beaucoup plus que ce que les déclarations, un peu guerrières des uns ou des autres laissaient prévoir. Le Britannique a notamment discuté avec Didier Reynders (Belgique), José Manuel García-Margallo (Espagne) et Jean Asselborn (Luxembourg). Tous les quatre souriants et plaisantant comme c’est l’ordinaire dans un préalable de Conseil. Le côté provocateur de BoJo devait être resté à Londres, à la plus grande satisfaction des Européens. « Boris Johnson est venu à ce Conseil avec une certaine modestie » a commenté Jean-Marc Ayrault, le ministre français des Affaires étrangères, après la réunion.
Un message clair, le Royaume-Uni n’abandonne pas l’UE
Les Britanniques entendent, en tout cas toujours compter en Europe. Johnson l’a précisé. « Quitter l’Union européenne ne signifie en aucun cas quitter l’Europe ». Le Royaume Uni « n’abandonne pas son rôle de leader dans la participation et la coopération en Europe ». Un propos que John Kerry, le secrétaire d’Etat US, présent à la réunion, a confirmé, beaucoup plus prolixe, sur le chapitre que les Européens en fait. Boris Johnson a rappelé sa « ferme intention de rester une composante très importante de l’Union européenne notamment dans la relation entre l’Union et les Etats-Unis » a souligné, après la réunion, l’Américain. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni partagent « la même volonté d’une transition en douceur en maintenant une forte coopération avec l’Union européenne ».
(Lucas Millet & Nicolas Gros-Verheyde)
(1) La base aérienne de la RAF à l’ouest de Londres. Une vénérable institution au Royaume-Uni, puisqu’elle a servi de base à l’envol des bombardiers britanniques vers l’Allemagne durant la seconde guerre mondiale